mercredi 22 décembre 2010

Le plaisir d'écrire à la main

Rien n'est plus léger que de tenir une plume, ni plus heureux; les autres plaisirs sont éphémères, et leurs ravissements nocifs. La plume apporte la joie quand on la prend en main, et la satisfaction quand on la pose.
Pétrarque
Mes plus lointains souvenirs sont liés à l'écriture. J'ai toujours aimé écrire, tout comme j'ai toujours aimé lire. Néanmoins, le plus lointain souvenir que je puisse rappeler à la surface de la conscience est vague, imprécis : tracer des suites infinies de lettres sur des lignes dans un cahier ligné d'écolier, avec une plume qu'on trempait dans l'encre. De grandes grosses lettres... aussi belles et parfaites que le bras et la main d'un enfant pouvait le faire. Bien entendu, on tachait la page blanche du cahier de pratique et on se tachait les mains d'encre... Il fallait bien casser les œufs pour faire une omelette, n'est-ce pas?

Il y a une quarantaine de mois, j'avais visité une exposition spéciale dans un des musées de ma région. De passage, par curiosité, dans la boutique du musée, j'ai remarqué qu'on y vendait des ensembles de plumes métalliques et de portes-plume, ainsi que des encres et des carnets. Les souvenirs d'enfance ont refait surface, ont surgi des replis de ma mémoire : j'ai eu plaisir à apprendre à tracer mes premières lettres, à m'appliquer à leur donner forme, à les assembler, à former mes premiers mots. J'ai acheté un de ces ensembles, en me promettant de me consacrer à la calligraphie lorsque viendrait la retraite, lorsque je disposerais de plus de temps à perdre.

Reconstitution personnelle de vieux souvenirs d'une enfance ressuscitée...
pupitre d'écolier, encrier, encre, plumes, porte-plume, papier buvard, coffre à crayons...

Quelques mois plus tard, il y a trois ans, je recevais un ensemble de stylo-plume et de stylo à bille roulante en cadeau. Ce fut l'étincelle qui raviva une passion qui était demeurée latente pendant des années. J'ai fouillé dans mes tiroirs. J'ai réanimé ma vieille plume. Celle qu'on m'a donnée en cadeau lorsque j'ai amorcé le deuxième cycle de mes études. J'avais douze ans. Je la surnomme ma collégienne.
À la même occasion, à l'aube de mes soixante ans, donc, j'ai résolu de prendre le temps de le perdre... à écrire... Pendant des années, j'ai pratiqué le métier de scribe, au service d'organisations plus ou moins grandes. Désormais, je prendrais le temps d'écrire pour me faire plaisir... pour mettre de l'ordre dans mes ruminations... J'aurais pu le faire en me servant d'un ordinateur. J'ai choisi de le faire manuellement. Ce fut là une prise de conscience. J'ai constaté que j'écrivais mal, que j'avais de la difficulté à écrire lisiblement, moi qui m'enorgueillissait déjà, il y a longtemps, d'avoir une belle main d'écriture. 


Ma collégienne, qui m'accompagne depuis un demi-siècle...
J'avais négligé mon écriture. Comme tous ceux dont c'est le métier d'écrire, j'ai adopté l'ordinateur dès le début. Deux décennies et plus ont passé. Je n'utilisais plus le crayon, le stylo ou la plume que pour prendre des notes, griffonner des ébauches, dresser des listes ... Avec le temps, j'étais devenu très habile à manipuler le clavier et la souris. On avait l'impression que nos doigts suivent plus facilement le rythme de la pensée. La réalité, c'est qu'on appréciait la facilité avec laquelle on pouvait composer. L'ordinateur augmentait le plaisir d'écrire. Alors, pourquoi vouloir revenir en arrière, reprendre la pratique de l'écriture manuelle.

Au point de départ, je n'avais pas l'impression de faire marche arrière. Je voulais tout simplement renouer avec le plaisir d'écrire à la main.

Je me suis donc procuré quelques livres sur la calligraphie. À vouloir soigner mon écriture, j'ai vite compris qu'il me fallait ralentir, que je ne pouvais écrire aussi « vite » à la main que je le faisais à l'ordinateur, que je devais réapprendre à prendre le temps. J'ai constaté qu'il me fallait réapprendre à tracer mes lettres. C'est difficile d'apprendre à écrire; c'est du travail, un travail minutieux; on l'oublie avec le temps. Avec la pratique, des heures de pratique, le geste d'écrire devient plus aisé; je le maîtrise aujourd'hui beaucoup mieux.

Je voulais tout simplement renouer avec le plaisir d'écrire à la main.

mercredi 15 décembre 2010

Voyager en auto-caravane

Septembre et octobre 2010

Comment s'y prend-on pour parcourir 3 000 kilomètres pendant six semaines, sans changer de chambre à tout bout de champ, sans avoir à refaire ses valises à tous les deux ou trois jours, ou même à chaque semaine, et en ne mangeant dans les restaurant qu'environ une fois sur trois en moyenne?

Pour nous, le camping est une manière de voyager. Ce n'est pas une activité en soi. Nous savions depuis longtemps que se déplacer en auto-caravane offre de nombreux avantages pour effectuer un long parcours sur une longue durée. L'avantage le plus important, à notre avis, c'est celui de se sentir chez-soi pendant qu'on se déplace. 

L'impression de se sentir chez-soi...

Certaines personnes, lorsqu'elles voyagent, préfèrent se faire servir tous leurs repas et ne pas s'occuper de l'entretien de leur chambre d'hôtel. D'autres se lassent rapidement de ce régime et, bien qu'ils aiment découvrir de nouveaux pays, s'ennuient de leur chez-soi. Un couple de Québécois que nous avons croisés lors de notre visite de la Cathédrale Sagrada Familia à Barcelone, nous ont confié que l'aspect qui les dérangeait le plus de leur voyage était celui de ne pas dormir dans leur lit à tous les soirs.
 

Un point d'ancrage...
Une auto-caravane est l'équivalent d'un petit appartement mobile. Ce n'est pas beaucoup moins spacieux qu'une chambre d'hôtel. 

Dès le premier jour où nous en avons pris possession, nous avons vidé nos valises et nous avons rangé nos effets dans les tiroirs, les armoires et la pharmacie. Le modèle d'auto-caravane que nous avons loué ne manquait pas d'espace de rangement, tout au contraire. Même le réfrigérateur était plus volumineux que nous l'avions prévu. L'espace habitable, par contre, était restreint mais confortable. 

Premier matin en camping en France, à Lyon



Le premier jour, nous avons aussi commencé à nous équiper : les éléments de base pour faire la cuisine et les produits d'entretien tels que du savon et des éponges, ainsi que des boîtes de papier-mouchoir, des serviettes de papier, une rallonge électrique, etc. À la même occasion, nous avons fait nos premières provisions : fruits, légumes, viandes froides, huile, pain, oeufs... Nous avons été chanceux : il y avait un centre Auchan, un hypermarché, à distance de marche du premier camping où nous nous sommes installés. On y a trouvé tout ce dont nous avions besoin pour amorcer notre exploration du sud de la France. Ce fut une activité qui nous a permis de mieux connaître la France et les Français, telle qu'on ne l'aurait pas connue si on avait choisi un autre mode d'hébergement et de déplacement.


Préparer son propre repas accentue cette impression de vivre chez-soi en voyage.
On achète le poisson le jour même... les légumes sont frais...

Cette impression d'être chez-soi se renouvelle à tous les jours, dès le matin en se levant, jusqu'en soirée, et surtout au moment des repas. 

Nous avons souvent mangé dans l'auto-caravane : pas seulement le matin et bien souvent le soir, mais aussi à l'heure du midi, dans des haltes routières, ou sur le bord de route, lorsque l'occasion s'y prêtait et que c'était sécuritaire. 
 

S'approvisionner... 
Il faut reconnaître que c'est très agréable de faire son marché en France et en Catalogne. Du pain frais à tous les jours, du fromage et du vin de chacun des « pays » que nous avons visités, des fruits et légumes frais, et les produits locaux de toute nature. On trouve un grand choix de produits, autant dans les marchés publics que dans les boulangeries, les boucheries, et autres marchés d'alimentation -- superettes, supermarchés, hypermarchés... 

Place du Marché - Marseillan Plage
À distance de marche du camping
Ce n'est qu'au camping Tres Estrellas, en banlieue sud de Barcelone, qu'on a trouvé sur le terrain de camping-même, presque tout le nécessaire dont on peut avoir besoin en camping. Même en fin de saison, les étalages du petit magasin y étaient remplis de toutes sortes de produits : des produits congelés aux plats cuisinés et aux aliments frais, ainsi que des conserves, des outils, des ballons, et des parasols pour la plage.

Partout ailleurs, il fallait sortir du terrain de camping pour s'approvisionner. Dans les régions rurales et dans les petites communes, comme à Ambert en Auvergne ou à Marseillan-Plage au Languedoc, il y a les marchés hebdomadaires. Des producteurs locaux nous présentent eux-mêmes leurs produits. C'est un réel plaisir de s'entretenir avec ces producteurs de leurs produits : la différence entre tel et tel miel ou fromage, quelles sont leurs recettes... La relation avec le marchand devient personnelle.

Chaque jeudi matin au marché public d'Ambert, en Auvergne, on offre
un grand choix de produits frais : pain, fromages, saucisson, vin...

Partout où nous avons fait nos emplettes, nous avons parlé, souvent même dans les grandes surfaces. 

Le matin, à Figeac dans le Lot, en se rendant au Musée des écritures du monde, nous nous sommes arrêtés dans une boulangerie pour nous informer des heures d'ouverture. Nous voulions nous assurer que nous pourrions y acheter du pain en fin de journée, en retournant au camping. La boulangère a non seulement répondu à notre question, elle nous a aussi suggéré un restaurant tout près du musée pour le repas du midi - elle en connaissait la propriétaire. Nous y sommes revenus en fin d'après-midi. Elle ne nous a pas seulement vendu du pain, des croissants et des pâtisseries, elle s'est aussi informée d'où nous venions, ce que nous faisions dans la vie, comment on avait trouvé le restaurant, la ville, le musée, ... À un moment donné, je me suis rendu compte qu'elle nous faisait parler, et qu'elle prenait autant plaisir à écouter notre accent que nous en avions à écouter son accent du Midi...




C'est pour le plaisir de l'expérience d'y vaquer que nous nous sommes promenés
dans les allées bondées du grand marché central de La Boqueria,
en plein centre de Barcelone. Nous y avons fait une petite épicerie
de légumes et de fruits frais que nous avons ramenés en autobus
jusqu'au camping à la fin d'une journée de tourisme.

Les sites de camping
Étant donné la saison, il y avait peu d'affluence dans les terrains de camping. Il est vrai que les Européens pratiquent beaucoup plus l'autonomie en camping que nous le faisons en Amérique du Nord, ce qui enlève de la clientèle aux établissements de camping. Nous n'avons pas eu besoin de réserver nulle part. Par contre, il faut tenir compte des heures d'ouverture. Plusieurs établissements ferment tôt. On peut s'installer pendant la soirée et s'enregistrer le lendemain matin. Il est bon d'arriver tôt aux établissements situés dans ou près des grandes villes, pour choisir un site agréable.


Les installations sont sécuritaires et elles sont généralement bien entretenues. Sauf de rares exceptions, nous avions accès à l'Internet, généralement dans un périmètre rapproché de l'accueil. Parfois c'était gratuit.

Partout, nous avons choisi des sites de camping en fonction de l'accès qu'ils nous offraient aux endroits que nous voulions visiter. Dans le cas des grandes villes, Lyon, Bordeaux, Toulouse, Barcelone, Avignon, nous avions accès au réseau de transport en commun. Dans les autres endroits, tel qu'à Ambert, Figeac, Sarlat, on pouvait se rendre à pied aux lieux que nous voulions visiter. Les seules régions où nous avons éprouvé des difficultés d'accès sont cellec du Languedoc et de la Provence. Nous avions prévu nous installer dans un endroit relativement central, d'où nous pourrions essaimer. Marseillan-Plage nous était apparu comme étant idéal pour visiter Sète, Nîmes, Montpellier... L'accès aux stationnements y est très difficile pour les camping-car. Nous avons été chanceux de trouver une place à Sète. Pour visiter Marseille, nous avons pris le train régional pour faire un aller-retour à partir d'Avignon.


Au tout début du voyage, dans les montagnes de l'Auvergne, les nuits ont été froides. Ailleurs, la température fut très agréable.


Les routes
L'auto-caravane que nous avons louée était un peu plus grande que celle que nous possédons. Nous avons donc dû nous habituer à la manœuvrer, surtout sur le réseau routier français. Les chauffeurs nord-américains qui sont habitués à conduire des véhicules plus gros, tels que des camions ou des autobus, trouveront que les rues sont étroites. La conduite est manuelle. Il n'est pas toujours facile de s'orienter, même avec les cartes les plus précises et détaillées; mais le caravanier le plus expérimenté doit composer avec cette réalité partout, même dans son propre pays ou sa propre région. Il faut s'habituer à la signalisation. On apprend graduellement, avec l'expérience à se fondre dans la circulation.


À plusieurs occasions, je me suis arrêté au cours de la journée pour me reposer... voire, faire la sieste, sur le bord de route. C'est un avantage dans une auto-caravane, de pouvoir s'allonger sur un lit. Il y a des haltes-routières dans la plupart des régions. À certains endroits, on y trouve de beaux panoramas. Certaines autoroutes sont payantes. Le long des celles-ci, certaines haltes offrent un minimum de services - essence, sanitaires, table de pique-nique. Ailleurs, on y trouve non seulement des services de restauration, mais aussi un hôtel et des boutiques qui mettent en valeur les produits de la région.


Halte routière de la Haute-Garonne, sur l'autoroute Entre-deux-mers,
à l'est de Toulouse, en direction de Carcassonne :
on y trouve un centre d'interprétation sur le Canal du Midi et
on peut y faire une randonnée en bateau.

Six semaines en voyage, c'est long. Mais nous croyons que de le faire en auto-caravane a été beaucoup moins épuisant que si nous l'avions fait en automobile ou par train. Nous avons pu visiter des régions rurales tout autant que des villes. Cette expérience de camping nous a aussi servi d'apprentissage pour les voyages de longue durée que nous avons l'intention de faire dans les années à venir.

samedi 4 décembre 2010

Dernière journée à Lyon -- visite de la Croix Rousse en matinée...

Mercredi 13 octobre, Lyon : un retour aux sources des mouvements ouvriers modernes en Occident

C'était notre dernière journée complète en France. Rappelons qu'il y avait grève générale ce jour-là en France.

Nous décidons de visiter le quartier de la Croix Rousse en matinée. Une visite opportune en quelque sorte, étant donné le climat social en France. 

Ils s'y connaissent en France, et spécialement à Lyon, mais aussi dans d'autres villes françaises, en matière de résistance aux pouvoirs établis. L'histoire sociale de la Croix Rousse, « la colline qui travaille », et de l'industrie du tissage de la soie en particulier en témoigne.

La Croix Rousse, vue de la rive droite du Rhône...
toute une colline à monter.

Nous remontons donc la colline de la Croix Rousse jusqu'à la Maison des Canuts. On y trouve un musée et une boutique. Des visites guidées permettent au visiteur de s'introduire à l'histoire de la fabrication de la soie à Lyon, de voir le fonctionnement des métiers à tisser Jacquard, et de mieux connaître l'histoire du quartier de la Croix Rousse et de ses habitants.  

*****

C'est une histoire à connaître et qui, lorsqu'on la connait, nous permet de mieux comprendre le présent. Le courant de l'histoire n'est pas uniforme. Parfois, il ralentit. Parfois même, il peut changer d'orientation. Il peut même régresser. Mais ça, c'est un tout autre sujet.

La fabrication de la soie était devenue, à la fin du 18e siècle, un véritable processus industriel. Plusieurs gens de métier y participaient, avec chacun son rôle dans une série d'interventions, une forme de chaîne industrielle. Il y a ceux qui fabriquaient le fil de soie, un processus en soi, ceux qui dessinent les motifs des tissus et ceux qui en programment l'exécution sur le métier en traduisant les dessins sur des cartes perforées... et ainsi de suite.


Le métier à tisser Jacquart, photos ci-dessus, est une innovation importante par rapport aux métiers antérieurs. Il permettait à un seul tisserand de le manipuler. Il combinait plusieurs techniques qui existaient antérieurement, dont celle de la carte perforée. 

Cartes perforées qui programment le métier pour l'exécution des motifs sur le tissu.
Il suffirait d'y conjuguer, progressivement, le long des décennies, sur deux siècles
la technologie de la machine à vapeur, à celles de l'électricité et plus tard, de l'informatique...




 














La visite terminée... un passage à la boutique, où on peut passer autant de temps que nécessaire à examiner un échantillon des meilleures productions des artisans de la Croix Rousse... puis, nous sommes retournés sur nos pas, afin d'amorcer la descente vers la presqu'ile de Lyon... Il est déjà midi. Nous nous arrêtons à la Brasserie des écoles, au 27 de la Place de la Croix Rousse. Bien entendu, nous ne vous la recommanderions pas si nous n'avions pas trouvé un repas et une ambiance très agréable. 



Pour redescendre vers le centre de Lyon, via la Place des Terreaux, nous avons traversé le réseau des Traboules... les passages qui traversaient les immeubles situées sur la pente de la Croix Rousse et qui constituaient des raccourcis pour les ouvriers qui la grimpaient pour se rendre à leur atelier.

samedi 6 novembre 2010

Digérer le voyage, le refaire et le raconter

Gatineau, le 6 novembre

Il y a un mois, lorsque j'ai affiché ma dernière rubrique dans ce carnet électronique, nous amorcions la dernière étape de notre voyage à travers le sud de la France.

Le mouvement social de protestation contre la réforme du régime de retraite prenait de l'ampleur et on avait annoncé la tenue de journées de grève pour la semaine qui suivrait. On avait de surplus évoqué la possibilité que les journées de grève se prolongent sur plusieurs jours, notamment, dans le secteur des transports. Nous ne savions pas comment nous réussirions à revenir de Lyon à Genève, pour la dernière étape de ce voyage. Finalement, nous avons éprouvé plus d'inquiétude que d'inconvénients, puisque nous avons pris le train régional qui assure la liaison entre Lyon et Genève, au jour et à l'heure où on l'avait prévu dans notre itinéraire original.

Le voyage continue

Tel que le philosophe Michel Onfray le souligne si bien dans sa méditation sur l'art de voyager, Théorie du voyage*, le voyage ne se termine pas au moment où on retourne dans sa région ou son pays, ni au moment où on ouvre la porte de notre domicile, qu'on ouvre les portes et fenêtres pour aérer une maison fermée depuis six semaines et qu'on reprend possession de ses biens... On gagne beaucoup à digérer les voyages que l'on fait.

Auparavant toutefois, il faut se réajuster de nouveau au décalage horaire; pendant quelques jours, on a tendance à se lever tôt, avant la fin de la nuit; notre estomac doit s'habituer et reprendre un nouveau rythme... Il faut vider les valises, faire la lessive, inventorier les acquisitions, les cadeaux, ranger... Il faut trier le courrier qui s'est accumulé, s'occuper des factures... Reprendre la routine.

On peut digérer le voyage lui-même en le racontant à ses amis, sa parenté, les réseaux de ses connaissances...

Pour ma part, je le fais surtout en relisant mes notes de voyage; en écrivant d'autres notes pour compléter celles que j'avais prises pendant le voyage; en examinant les photos que j'ai prises, les trier et les classer, en éliminer plusieurs, traiter celles qui représentent un certain intérêt.

Le voyage se poursuit...


Il y a aussi les lectures

Contrairement à mon habitude, j'ai peu lu pendant ce dernier voyage. J'avais apporté avec moi l'ouvrage de Michel Onfray, cité ci-haut. C'est à mon retour que je l'ai lu, avec beaucoup de plaisir. Je compte bien m'y référer de temps à autres dans des rubriques à venir.

À la toute fin de notre voyage, en passant quelques minutes à la Librairie Gilbert Joseph à Lyon pour fureter les nouveautés et poursuivre mon exploration des papeteries en France, j'ai trouvé le livre suivant : Voyage dans le midi de la France, de Stendhal **. L'auteur des romans que plusieurs d'entre nous ont lus et étudiés au niveau collégial (Le Rouge et le noir, La Chartreuse de Parme), qui fut l'un des premiers à utiliser le terme « touriste », fit un voyage dans le sud de la France au printemps et au début de l'été 1838.

Je savais que ce journal de voyage avait été publié dans le passé; mais je ne l'avais pas trouvé dans les librairies et les bibliothèques publiques avant mon départ au début de septembre. Je suis en train de le lire présentement. Cette lecture suscite chez moi bien des réflexions. J'aurais aimé l'avoir lu avant notre départ, au cours de l'été. Peut-être aurais-je modifié notre itinéraire afin de suivre certains des pas de Stendhal. Cela aurait été une expérience intéressante. Mais pas nécessairement pour tenter de retrouver le passé... Plutôt pour en mesurer le passage, y prendre plaisir.

Michel Onfray en parle dans son essai sur l'art de voyager. Il souligne que s'il y a un intérêt à lire et à marcher dans les pas des Hérodote, Marco Polo, Robert Louis Stevenson, Jacques Lacarrière, Nicholas Bouvier et autres grands voyageurs du passé (plus ou moins récent), il faut bien reconnaître qu'on ne redécouvrira jamais les mondes qu'ils ont décrits. Il faut vivre ses propres voyages. Il ne sert à rien de déplorer le passage du temps. L'âge d'or est une théorie de l'esprit. Les découvreurs du passé ont découvert ce qu'ils ont vu, ce qui existait à leur époque. Tout comme nous pouvons encore le faire aujourd'hui.
Le temps passe, les civilisations bougent, elles naissent, croissent, meurent, connaissent un point d'acmé, entament une descente, chutent puis disparaissent, elles se trouvent remplacer par d'autres, plus vivaces, plus actives, plus fortes, mieux adaptées. Quel ridicule de vouloir figer un lieu temporellement visible dans une éternité inexistante...

Seuls les fantasmes président au désir d'une histoire arrêtée et indépendante des conditions d'exercice du temps réel...
(page 70)
Un couple français que nous avons croisé à Barcelone nous a dit qu'ils avaient parfois l'impression que la France était en train de se transformer en un gigantesque musée. En sous-entendu, je devinais une certaine exaspération, à peine suggérée, à l'égard d'une certaine attitude qui tend à vouloir tout préserver du passé.

Ce dont je prends conscience en lisant ce journal de voyage, c'est la valeur documentaire d'un tel ouvrage. Stendhal décrit un monde qui n'existe plus. Il compare, entre autres, les villes françaises les unes aux autres. Or même les Parisiens ne pourraient reconnaître le Paris que Stendhal décrit. C'était avant la grande rénovation urbaine conçue par Haussman, et que nous pouvons admirer aujourd'hui.

Les villes et les lieux qu'il décrit ont changé, ainsi que les modes de transport. Et c'est tant mieux. Bien qu'on puisse avoir plaisir à visiter des grottes vieilles de plusieurs dizaines de milliers d'années dans la Dordogne et le Périgord, les sites gallo-romains, les châteaux médiévaux, les églises de toutes les époques, nous voulons bien conserver aussi l'acquis des avantages de la modernité : l'eau courante, l'électricité, les réseaux routiers, ... Même le vin que nous buvons aujourd'hui est meilleur que le meilleur vin que l'ancien maire de Bordeaux, Michel de Montaigne, aurait pu déguster. Il faut donc bien s'accommoder des signes de la civilisation moderne, les lignes de haute tension, les centrales nucléaires, et les zones industrielles qui polluent les paysages...

Beaucoup d'eau a coulé dans la Garonne depuis que Stendhal y a longé ses rives, de Bordeaux à Agen, d'Agen à Toulouse, qu'il a poussé son exploration jusque vers les Pyrénées basques du côté de l'Atlantique et, du côté de la Méditerranée, vers Marseille et Toulon... Néanmoins, il est intéressant de comparer les descriptions qu'il a faites de certains paysages, urbains autant que ruraux, avec l'état présent de ces lieux.

Il constate, entre autres, qu'il a de la difficulté à comprendre les accents du pays, à Toulouse par exemple. Aujourd'hui, nous avons eu plaisir à écouter l'accent occitan des gens du pays, autant qu'ils en ont eu à écouter le nôtre. Les conversations avaient tendance à se prolonger, très agréablement. Nous nous en donnions mutuellement le temps. Mais le seul endroit où nous avons entendu quelques mots d'Occitan, c'est dans le métro de Toulouse, où on annonce les noms des prochaines stations en Français et en Occitan.

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* Michel Onfray, Théorie du voyage, Poétique de la géographie, Librairie générale française, Livre de Poche (4417), 2007
** Stendhal, Voyage dans le midi de la France, Réédition par François Bourin Éditeur, 2010

dimanche 10 octobre 2010

Le début du retour...

Avignon, dimanche après-midi, 10 octobre

C'est l'automne ici. Pas le même automne qu'au Québec, mais l'automne tout de même. Des feuilles qui jaunissent et tombent.

Demain, nous amorcerons les premières démarches de notre retour au pays. Dimanche prochain, nous serons chez-nous.

La semaine qui vient peut encore nous réserver des surprises. Les mouvements sociaux en France peuvent nous compliquer la vie. Mais ce n'est pas à nous de s'en plaindre... au contraire. Environ trois quarts des Français appuient ce mouvement de protestation. On composera avec la tournure des événements dans les jours à venir. Telle est la nature même des voyages : apprendre à composer avec la réalité.

Trente jours dans notre « cabane motorisée en France », c'est à la fois long et court. Notre parcours était épuisant. Nous avons appris bien des choses sur les voyages de longue durée. Entre autres, que nous devons apprendre à nous rythmer, à nous donner du temps pour digérer, se reposer, reprendre le souffle. Nous ralentissons nos activités. Nous multiplions les journées de pause.

Demain, donc, nous quitterons Avignon pour retourner à Lyon. On nous annonce de la pluie. Nous devons remettre l'auto-caravane à l'agence de location mardi matin.

***

Depuis quelques jours, nous avons bénéficié de journées splendides, chaudes et ensoleillées. En partant de Marseillan-Plage, où nous avions passé six jours, nous avons traversé la Camargue, en direction d'Avignon. Le lendemain, nous avons pris le train régional, pour un aller-retour d'une journée jusqu'à Marseille. Hier, nous avons visité Avignon. Aujourd'hui, nous sommes allé faire un tour dans la campagne environnante du Vaucluse, pour visiter, entre deux averses de pluie (puisque le temps a changé), le Village des Bories.

Le Village des Bories

On baigne dans l'histoire depuis le début du voyage.

À Marseille, on nous a fortement recommandé, étant donnée le temps que nous avions l'intention de passer dans cette ville, d'aller visiter le Jardin des vestiges et le Musée d'histoire de Marseille, qui lui est attenant. Diane, qui a enseigné l'anthropologie à des étudiants du Cégep pendant un tiers de siècle, était dans son élément.

Diane était dans son élément
 

Il y a 25 siècles, des Grecs venus de la Turquie d'aujourd'hui, fondaient un comptoir
sur le site illustré ci-dessus, qui allait devenir la ville de Marseille avec le temps.
Selon la légende, leur chef a épousé une princesse originaire du peuple qui habitait les environs.
Une légende qui explique fort bien la nature de cette ville et l'image que se font les Marseillais d'eux-mêmes.

La visite de ce site nous en apprend beaucoup sur Marseille et les Marseillais. Nous avons particulièrement été impressionnés par le travail d'une jeune femme qui guidait en groupe d'enfants de six ou sept ans à travers le Musée. À ces enfants, elle expliquait les origines de « leur » ville. Elle s'adressait à eux, des enfants d'origines diverses, en leur disant constamment, « Nous, les Marseillais, nous... » Une belle leçon d'intégration.

Depuis quelques jours, nous nous répétons constamment qu'il faudra revenir un jour, dans quelques années, dans cette grande région.

Il y a tant à voir et le temps que nous avions nous a obligés à faire des choix difficiles : Nîmes, Aix-en-Provence, ou Avignon? Comment véritablement connaître une ville lorsqu'on n'a qu'une journée pour l'explorer? Ce qui n'empêche pas d'y faire des découvertes inattendues.

Nous avons vraiment aimé traverser la Camargue. Hier, à Avignon, nous avons marché sur le Pont Saint-Bénézet à Avignon et on a appris que ce n'est pas sur le pont qu'on danse, mais bien sous le pont qu'on y dansait. Le pont n'est vraiment pas assez large pour y danser une sarabande ou une farandole.

Le Pont Saint-Bénézet, à Avignon.
Beaucoup trop étroit pour qu'on puisse y danser une sarabande ou une farandole

À suivre...

lundi 4 octobre 2010

Quelques mots à la sauvette...

Marseillan-Plage

Que le temps passe vite. On en perd la notion du temps.

Quatre semaines que nous voyageons. Il ne nous reste plus qu'une dizaine de jours avant notre retour en Amérique.

Je m'excuse de mon manque de constance. J'ai cessé d'afficher des notes de voyage sur ce carnet électronique parce que cela me prenait trop de temps. Le temps de télécharger les photos sur l'ordinateur dans leur état brut, de les traiter par la suite, de les télécharger sur Internet, et de les afficher ici. Puis de rédiger un texte, un texte que je trouvais trop superficiel, qui ne rendait pas justice à ce que nous ressentons en faisant ce voyage.

Il y a tellement de choses à raconter.

Par exemple, ce vieux monsieur de 90 ans rencontré sur un quai à Bordeaux, qui nous a parlé de ce que Bordeaux avait l'air il y a un demi-siècle et plus. On pouvait imaginer, en regardant ses yeux pendant qu'il nous décrivait ces lieux où il a vécu et travaillé toute sa vie, à quoi pouvait ressembler le port de Bordeaux, et ces demeures somptueuses de la grande bourgeoisie des négociants vinicoles qui a régné si longtemps sur la ville.

Ou encore, de cette visite très émouvante et inspirante au Musée national de la préhistoire à Les-Eysies-de-Tayac : dire que l'humain, nos ancêtres à tous, habite le territoire que nous visitons depuis 40 000 ans et plus.

Sous un abri de pierre à Les-Eysies-de-Tayac,
à l'extérieur du Musée national de la préhistoire
Outre ces compte-rendus de rencontres et de visites que nous avons faites, il y a aussi l'expérience même de voyager en « camping-car », comme on le dit ici, ainsi que l'expérience du camping en France et en Catalogne, en cette période de l'année.

Je me suis souvenu de notre voyage en Nouvelle-Angleterre l'an dernier. J'avais tenu un journal de voyage... des notes manuscrites, des compte-rendus de nos expériences, des réflexions, des impressions... Cette fois-ci, je n'ai presque rien écrit dans mon carnet de voyage, jusqu'à ce que je suspende en partie ma présence sur Internet. Je me suis rendu compte que j'y perdais au change. C'est pour cette raison que depuis notre passage à Sarlat, j'ai repris l'écriture manuelle de mon journal de voyage.


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Depuis Figeac, nous nous sommes arrêtés à Sarlat, Bordeaux, Toulouse, Barcelone. Les distances ne sont pas énormes, en comparaison des distances auxquelles nous sommes habitués chez-nous au Québec et dans le reste du continent nord-américain. Un voyage en Gaspésie à partir de Montréal serait probablement moins long, même sans passer par le Saguenay ou la Beauce.

Nous sommes aujourd'hui rendus dans le Languedoc, dans un village de villégiature, sur le bord de la Méditérranée. Un village qui est en train de se préparer à une longue hibernation. 




Au début du mois d'octobre, on n'y retrouve que quelques p'tits vieux comme nous, qui profitent des derniers jours d'une saison qui traîne en longueur.

La saison touristique, m'a-t-on expliqué hier soir, n'a pas été bonne cette année. On se ressent ici de la crise économique qui secoue tout le monde occidental. Elle a été pire que l'année précédente. Le tenancier du bar où je prenais mon café tout en rédigeant mon journal de voyage me confiait qu'ils auraient de la difficulté à tenir le coup si l'afflux touristique ne reprenait pas un plus de vigueur l'an prochain.

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Samedi soir dernier, le Grec s'est graduellement imposé dans le paysage. Le Grec, c'est le vent du Nord-Est. Il soufflait fort, très fort. Il nous a inquiété toute la nuit. Le matin, il m'a carrément intimidé. Nous avons décidé de ne pas bouger hier. Il a continué à souffler toute la journée, et toute la nuit de dimanche à lundi. Le Grec bouleverse tout. Il dérange. Il a même interrompu la communication Internet depuis samedi soir sur le terrain de camping. Ce matin, il soufflait toujours très fort.




On prend un certain rythme en voyage. Moduler ce rythme est important. Parfois, les événements s'en chargent. Depuis quelques jours, c'est la température. Mais à Bordeaux d'abord, il y a une dizaine de jours, puis à Barcelone à nouveau en milieu de semaine la semaine dernière, c'est l'actualité qui nous a pris au passage. Les Français affichent leur opposition à la réforme du régime de retraite public.

Nous avons modifié notre itinéraire pour tenir compte de la journée de grève du 23 septembre dernier un peu partout en France. Il n'y avait pas de transport à commun dans les grandes villes. Nous avons donc repris la route cette journée là. Au moins, nous nous étions préparés à cette éventualité.

À Barcelone, nous avons été surpris d'apprendre le jour de notre arrivée, qu'il y aurait grève générale le lendemain. Heureusement, le camping était situé sur le bord de la plage.




Il faisait chaud. Le ciel était bleu... méditerranéen. On a fait un peu de ménage, j'ai rattrapé des retards (photos, prise de notes de voyage, ...), nous nous sommes baignés... Bref, on se l'est coulée douce. Le lendemain nous reprenions notre rythme... Une journée dans Barcelone, avant de revenir en France vendredi dernier.

Demain, nous poursuivons notre périple. Je souhaite qu'il fasse beau.

mardi 21 septembre 2010

Figeac

Nous avons été chanceux jusqu'à présent, quant à la température. Les journées ont été généralement très automnales : fraîches, voire carrément froides la nuit, se réchauffant au cours de la journée. Mais en général, le temps a été beau.

Le temps s'est couvert graduellement lorsque nous avons quitté Ambert, en direction d'Issoire.

Nous nous sommes arrêtés sur le bord de la route pour dîner, à la sortie de Parentignat, tout près d'Issoire, juste avant de rejoindre la E11/A75, la Méridienne, l'autoroute qui mène vers le Languedoc et la Méditerranée. L'avantage de voyager en motorisé, c'est qu'on peut prendre le temps de faire la sieste, le temps qu'il faut pour digérer, en s'allongeant sur un lit.

Deux heures plus tard, nous reprenions la route. À Massiac, nous avons bifurqué vers l'Ouest en empruntant la N122, en direction d'Aurillac. Le ciel devenait graduellement de plus en plus lourd. À Murat, il a commencé à pleuvoir.

J'aurais tellement voulu admirer le paysage des montagnes volcaniques de l'Auvergne, entre Ambert et Figeac. Les éléments ne me l'ont pas permis. À la station du Lioran, nous avons dû tortiller pour monter dans la montagne, où nous nous sommes retrouvés dans les nuages. Je n'ai donc pu admirer le vieux volcan du Puy Mary. Nous avons poursuivi notre route vers Aurillac, où nous avons fait le plein d'essence. Une heure et quelques minutes plus tard,  nous sommes entrés à Figeac, en fin de journée.

Les nuits sont froides depuis quelques jours. Le lendemain matin, nous nous sommes réveillés dans une brume épaisse.

Le Camping des Rives du Célé à Figeac tôt le matin, dans la brume

Mais cela nous importait peu, puisque nous allions passer la journée au Musée Champollion, le Musée des écritures du monde. ... À l'accueil du terrain de camping. la jeune dame nous a fortement déconseillé de se rendre au Musée en motorisé. Elle nous a assurés qu'il ne faudrait pas plus de vingt minutes en marchant lenn-te-ment... en mettant l'accent sur le premier « n » du mot, et en appuyant sur la deuxième syllabe, tout en étirant la dernière. Elle n'avait pas tort. Sauf que nous sommes probablement très lents. Surtout qu'il y a beaucoup de distractions et que je prends mon temps pour la photo.



Le Céré à Figeac
L'accent occitan est ici beaucoup plus prononcé qu'à Ambert. Nous y prenons autant plaisir que les gens de la place prennent plaisir à écouter notre accent. J'ai même l'impression qu'on fait durer les conversations juste pour le plaisir de la conversation.

On parle de tout et de rien...

Avec la boulangère par exemple, sur notre route en entrant dans la ville. Elle nous avait recommandé un bon restaurant pour le déjeuner, à l'heure du midi... une très bonne recommandation d'ailleurs : Le Grain de sel, pas très loin du Musée. On n'entre pas dans une boutique ou un commerce sans dire bonjour avant de demander ce que veut; on prend aussi le temps de jaser. Le commerce est une activité de socialisation. Elle est personnelle ici.


Nous avons aussi parlé de tout et de rien avec un employé de la municipalité, rencontré au hasard, lorsque nous lui avons demandé des directions pour se rendre à un endroit d'où l'on pourrait contempler d'un point de vue plus élevé, la gigantesque reproduction de la Pierre de Rosette, qui repose au centre de la Place des écritures. Quel hasard! ... il a retardé son retour au travail pour jaser un peu avant de nous présenter à un autre employé, qui nous a non seulement ouvert les portes du jardin que nous cherchions, mais qui a aussi pris le temps de répondre à toutes nos questions sur la conservation du patrimoine architectural de la ville... dont notamment les défis qu'avait représentés la rénovation de la maison natale de Champollion au moment du réaménagement du musée.


Les murs de Figeac, nous les avions contemplés au cours d'une courte flânerie dans les rues de la ville, au début de l'après-midi, avant la réouverture du Musée, tout en digérant notre déjeuner. Nous les avions contemplés le matin en se rendant au Musée, et en prenant le café à la Place Champollion, en attendant l'ouverture du Musée le matin. Nous les contemplerions à nouveau en fin d'après-midi, au moment de retourner au camping, sans oublier de passer chez la boulangère que nous avions rencontrée le matin...



Les murs sont vieux à Figeac mais, comme on peut le constater, les activités derrière les murs sont contemporaines...


Voici un exemple des bijoux qu'on trouve au Musée des écritures :
deux pages d'un des cahiers de travail de Champollion, alors qu'il déchiffrait les hiéroglyphes. Le mot manuscrit prend un tout autre sens quand on contemple celui-ci :



Prochaine étape : Sarlat-la-Canéda et la visite du Musée national de la préhistoire à Les-Eysies.

dimanche 19 septembre 2010

Ambert

Je vous dois toutes mes excuses pour cette absence de près d'une semaine.

Malgré toutes les merveilles des techniques télématiques aujourd'hui, outre le fait que je n'ai pas beaucoup de temps pour afficher mes petits reportages, j'ai été incapable d'établir une communication par Internet depuis quelques jours.

Nous avons fait du chemin depuis que nous avons quitté Lyon, mardi dernier.

Notre voyage se déroule un peu comme nous l'avions prévu quant à l'itinéraire. Mais il faut parfois s'adapter.

Les événements nous amènent parfois dans des sentiers que nous n'avions pas prévus... tel que hier soir par exemple. Nous sommes arrivés à Sarlat-La Canéda hier. Une belle petite ville qui a conservé son patrimoine médiéval. Son centre-ville à l'intérieur des anciens murs est protégé.

Une surprise nous y attendait. Nous sommes arrivés au cours des Journées du Patrimoine. Hier soir, comme à chaque année depuis un quart de siècle, les Sarladais ont éclairé leur ville avec une dizaine de milliers de lampions. Simultanément, on y a présenté une quinzaine de manifestations artistiques... théâtre, tour de chants des troubadours, exposition de peintures et de photographies, installations, concert de musique romantique... L'atmosphère est magique.


Ambert

En quittant Lyon, nous nous sommes dirigés vers Ambert, dans le département du Puy-de-Dôme, en Auvergne. C'est une petite ville. Guère plus de 7 000 habitants. Ce qui est étonnant, c'est ce qu'on peut y faire...

Ambert,en Auvergne

Nous aurions pu y passer une semaine entière sans se lasser. 

Ainsi, nous aurions pu visiter la Maison de la fourme; la fourme étant le fromage du pays, un fromage bleu, très doux, très délicieux, qui se mange avec tout et en toutes circonstances... au petit déjeuner en tartine, dans une salade à l'heure du midi pour le déjeuner, ou avec des saucisses, au souper...

Nous aurions pu aussi faire une randonnée dans le petit train touristique, ou visiter le musée des instruments agricoles. Mais nous avons préféré faire une petite randonnée (motorisée) dans les montagnes des environs pour visiter le petit musée de l'École de 1900 à Saint-Martin-des-Olmes, ainsi que le moulin à papier Richard-de-Bas.

L'École de 1900 est une célébration de l'école républicaine, accessible à tous, instituée par Jules Ferry il y a plus d'un siècle. Les garçons d'un  côté de la salle de classe unique dans les petites communes, et les filles de l'autre. L'institutrice habitait le troisième étage, comme dans les écoles de rang de nos campagnes québécoise, il n'y a qu'un peu plus d'un demi-siècle. Au moment où nous sommes arrivés, il y avait une visite organisée de personnes âgées, plus âgées que nous, des Français, qui s'y reconnaissaient visiblement. Tout un étage est consacré aux jouets des enfants, souvent confectionnés par leurs parents ou leurs grands-parents. Comme l'animatrice le soulignait, les enfants apprenaient à devenir des adultes tout autant en jouant avec leurs jouets qu'à l'école même. À l'étage, une salle entière était consacrée aux livres, aux outils pédagogiques (cartes géographiques, tableaux, ...) et aux instruments d'époque liés à la vie scolaires... règles en bois, compas, plumes et porte-plumes, étuis à crayons, encres, cahiers, sacs d'école, crayons...



À la boutique, en sortant, j'y ai personnellement fait le plein d'instruments d'écriture, pour compléter ma collection d'objets d'écriture : ardoise, crayon en ardoise, divers crayons d'époque, porte-plume, cahier d'écolier, règle en bois, taille-crayon...

C'est pour visiter le moulin à papier Richard-de-Bas que nous avions choisi de nous rendre au coeur de la France, en Auvergne, un pays montagneux. Ce moulin est un des plus vieux en Europe. Il y a bientôt sept siècles, on y a innové en utilisant le pouvoir hydraulique pour activer d'immenses piles qui déchiquetaient de vieux chiffons, pour en faire un pâte.

On fabrique le papier dans cette région depuis 1326. Ce fut pour nous deux une visite des plus agréables et instructives. Au cours d'une visite d'un peu plus d'une heure et demi, on y décrit le contexte social et économique de la production du papier autrefois, avant la révolution industrielle; on y raconte l'histoire du papier; mais surtout, on y fait la démonstration de la fabrication du papier. C'est une chose de lire des descriptions des processus de fabrication du papier. C'en est une autre que de le voir. Chaque feuille devait être fabriquée de telle sorte qu'elle ne soit ni trop épaisse, ni trop mince, calibrée selon des barèmes précis.
L'entrèe du Musée historique du papier - Le moulin Richard de Bas.

Bien entendu, j'ai fait provision de quelques feuilles de ce papier. Je n'ai pas encore touché ce papier avec mes plumes. Le site même est superbe. Le temps était magnifique.


Jeudi est jour de marché à Ambert. 


Le vendeur de miel, un jeune homme très sympathique. Son miel est délicieux
La mairie ronde d'Ambert, un édifice unique,
mentionnée dans le roman de Jules Romain, Les Copains d'abord.
Ce roman inspira un film dont la chanson titre, bien connue,
est celle de George Brassens.
Comment résister à tant de tentations? Nous en avons profité pour y faire quelques provisions, avant de nous diriger vers Figeac, dans le Lot. Un tout autre pays comme on le dit ici. Une longue randonnée de quelques heures.

dimanche 12 septembre 2010

Un guide touristique est un instrument indispensable pour quiconque veut pleinement profiter d'un voyage à l'étranger. Mais rien ne vaut le contact direct avec les gens qui habitent les pays qu'on visite. Ce sont eux qui y vivent quotidiennement. Ils peuvent nous apprendre bien des choses qu'on ne trouverait pas dans des livres, ou dans des pages de l'Internet.

La France est un pays familier pour nous Québécois, surtout pour ceux qui, comme moi, ont fait leur « cours classique » à l'adolescence. Ce n'est pas tout à fait un pays étranger. Mais cela demeure, malgré toutes les affinités qu'il peut y avoir entre Québécois et Français, un pays étranger, de bien des points de vue.

Nous nous en rendons compte, de multiples façons, depuis trois jours que nous y séjournons.

Nous avons eu le bonheur, dès la première soirée, d'avoir été accueillie par une famille française, en fin de journée, au début du « week-end ». Sophie est une très grande amie de la famille de ma belle-sœur. Elle a étudié au Québec. Elle compte bien y retourner, avec son mari, Olivier. Nous avons passé une agréable soirée à jaser... de tout et de rien. Entre autres, nous avons appris, à la veille de prendre possession d'un camping-car pour quelques semaines, qu'il ne faut pas tourner à droite au feu rouge. On nous a vivement conseillé d'aller voir le défilé de la Biennale de la danse, qui eut lieu cet après-midi même, au centre de la ville. Nous aimerions bien suivre le conseil d'Olivier et d'aller faire notre marché aux Halles de Lyon, mais ce n'est pas nécessairement pratique dans notre cas. On verra... peut-être demain...

Nous avons donc pris possession de ce qui deviendra notre maison pour les prochaines semaines. Toute la journée hier y a été consacrée : se rendre à l'agence de location, examiner le véhicule, se familiariser avec celui-ci... Nous avons alors pris la route en direction du terrain de camping que nous avions repéré pour séjourner quelques jours. Et nous avons été pris, quelques minutes plus tard, dans un embouteillage, en traversant la ville de Lyon, un samedi-matin, du sud-est vers le nord-ouest. En après-midi, nous avons passé une bonne partie de l'après-midi dans un centre d'achat, à distance de marche, de l'autre côté de l'autoroute A6, Paris-Marseille. En soirée, nous avons vidé nos valises et commencé à habiter les lieux. Le véhicule conserve encore quelques mystères, que nous n'avons pas encore résolus. Ce n'est qu'une question de temps.
Une petite Fiat, plus grande que le camping-car que nous utilisons pour explorer l'Amérique du Nord.
Notre cinq étoiles mobile.
Nous nous sommes levés ce matin, bien reposés. Prêts à entreprendre une autre journée. Une autre longue journée : le marché des bouquinistes, sur le Quai des pêcheries, au bord de la Saône... Nous y avons chacun refait le parcours intellectuel d'une vie... ces livres qui ont nourris notre enfance, notre adolescence, notre vie adulte... difficile de résister aux tentations...



...puis le rassemblement, à la Place des Terreaux, des 16 groupes, réunissant 4 500 participants du grand défilé de la Biennale de la danse.




Enfin, en fin d'après-midi, la visite du Musée gallo-romain de Lyon...


description à compléter... je manque de temps. Dimanche soir, il est 23 h 00.

samedi 11 septembre 2010

Le temps fuit en voyage

J'ai de la peine à saisir que ce n'est que hier matin que nous attendions l'arrivée du TER qui nous a emmenés de Genève à Lyon. 


Gare de Cornavin, à Genève, en attendant le TER Genève-Lyon

Nous avons l'impression de nous retrouver dans un tourbillon. Tout passe si vite. Et pas de temps pour en rendre compte.

Il y a deux jours, jeudi, nous avions appris en quittant notre hôtel pour aller explorer Genève, que c'était jour de fête à Genève. Tout, ou presque tout, était fermé: la plupart des services publics (sauf le transport en commun et le bureau du tourisme), les grands commerces, beaucoup de restaurants même. On aurait dit que les Genevois avaient abandonné la ville aux touristes.

C'est en après-midi, en faisant jasette avec deux Genevoises dans un café, que nous avons appris ce qu'était le Jeûne genevois : une journée pour se souvenir des heures difficiles que les générations anciennes ont vécues dans le passé, plus ou moins récent. Elles avaient autant de questions à notre égard que nous en avions au sujet de la Suisse d'aujourd'hui.

Au cours de cette conversation, elles nous ont donné de bonnes adresses où on peut manger sans dépenser une fortune à Genève. Plus tard, en fin d'après-midi, nous nous sommes donc rendus au premier restaurant qu'elles nous avaient recommandé : le Bain de Pâquis. À moins qu'un Genevois ne l'y ait conduit, c'est probablement par hasard, en déambulant sur la jetée que le touriste découvrira ce restaurant. Et même s'il se rend compte qu'il s'y trouve un restaurant, il n'y prêtera pas attention. Erreur! J'y ai dégusté un magnifique canard au poivre noir. Dans les restaurants qui longent les quais du Lac Léman, à quelques pas de là, on aurait dépensé au moins le double pour un repas tout aussi délicieux.

La pluie a passé pendant que nous dînions. Elle a forcé tout le monde à entrer à l'intérieur. Nous y avons partagé une table avec un groupe de jeunes gens, dont deux Québécois. Le jeune homme était de passage en visite chez ses amies, dont une est étudiante en relations internationales à Genève. Il est originaire du Bas du Fleuve et a travaillé à Ottawa au cours de l'été qui vient de se terminer. À son avis, Genève est bien. Une belle ville, quoique plus tranquille qu'Ottawa.

En sortant à l'extérieur, on a constaté que la pluie était passée. Le soleil la repoussait au loin dans les montagnes avec un balai en forme d'arc-en-ciel.




Notre séjour à Genève a été court.

On a beau avoir le temps devant soi, les horaires de voyage peuvent être aussi inflexibles que celui du milieu de travail.

Nous devions partir vendredi matin. Nous avions un rendez-vous vendredi soir et un autre samedi matin.

jeudi 9 septembre 2010

Genève - premières impressions...

J'ai perdu l'habitude des vols transatlantiques. Le corps n'est plus aussi jeune. C'est plus difficile d'accuser le coup...  une attente plus longue et des procédures plus exigeantes pour l'embarquement; six heures assis dans un espace très étroit; l'adaptation à un nouveau rythme circadien; un estomac qui ne reconnaît plus son alimentation...

Il faut dire aussi que cela faisait trente ans depuis la dernière fois. C'était bien avant l'événement du 11 septembre fatidique.

Pourtant, la première fois que j'avais traversé, il y a quarante ans, tous les passagers avaient été obligés de débarquer de l'avion, afin que chacun puisse identifier ses bagages.Une personne qui s'était enregistrée plus tôt le matin même à Montréal n'était pas embarquée au moment du départ. Ses bagages étaient restés seuls, dans l'aire d'identification. Les agents s'étaient précipités sur ceux-ci, pour les isoler. Il avait fallu réembarquer et le navigateur avait dû refaire le calcul du parcours, avec de nouvelles données, quelques heures plus tard. Il pouvait toujours naviguer au sextant. 

Rien de tel aujourd'hui. Tous les passagers peuvent suivre le parcours sur un petit écran devant soi : la distance parcourue à tout moment, tout au long du vol, l'altitude, la vitesse au sol, la température extérieures. J'ai suivi la progression du vol sur toute la durée. J'ai su au moment exact à quel moment nous avons dépassé Terre-Neuve, à quel moment nous avions accompli la moitié du trajet... Une heure environ avant de s'approcher de l'Irlande, j'ai regardé à travers le hublot. J'ai perçu les premières lueurs du jour qui allait se lever à l'est.

À 10000 m d'altitude et à 1000 km/heure au-dessus de l'Atlantique

Quelques heures plus tard, nous débarquons à Genève.

Le temps de nous rendre à l'hôtel, déposer les bagages, nous rafraîchir, nous amorçons une première visite de la ville. Nous voulions, entre autres, activer le téléphone numérique; mais ça, c'est une autre histoire... (à venir au cours des prochains jours). Ce fut une longue marche dans les rues de la vieille ville... 



Aperçus de la Vieille ville de Genève 

... une longue marche en après-midi, suivie d'une autre, plus courte, après le dîner, en fin de soirée. Comble d'ironie, nous avons dîner à l'Age d'or (11, rue de Cournevin).

La ville nous plaît beaucoup. Nous nous sentons comme des gamins, mentalement, il faut le dire, qui gobent tout ce qu'ils voient, touchent, dégustent, sentent, et entendent. J'ai remplacé le couteau suisse qui m'avait été confisqué à l'aéroport de Dorval... ça aussi, c'est une autre histoire (à venir aussi au cours des prochains jours).

Décalage horaire : quelle heure est-il?

Aujourd'hui, au moment de repartir explorer, nous apprenons que c'est congé : tout est fermé partout, sauf les services publics essentiels et beaucoup de restaurants, mais pas tous. On marche. On parle avec des gens de la place dans un café, qui nous suggèrent toute une série de restaurants pas trop chers, pour satisfaire une variété de goûts.

Demain, nous prenons le train régional pour nous rendre à Lyon. Mais nous reviendrons dans un mois à Genève, pour reprendre l'avion qui nous ramènera chez-nous.